Pegasus et l’incroyable angélisme des médias et des politiques | Atlantico.fr
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Pegasus et l’incroyable angélisme des médias et des politiques
Un logiciel israélien capable d’aspirer le contenu de n’importe quel téléphone a été utilisé pour espionner des dizaines de milliers de Français. Révélée, l’information a fait grand bruit. Mais pouvions-nous vraiment ignorer être espionnés ?
« En permettant aux uns de duper les autres, la naïveté est un élément trop capital du bonheur humain, pour qu’on ne lui doive pas de l’indulgence. » Henry de Montherlant
Ainsi nous ignorions être espionnés ? Sérieusement ?
Une ONG, Amnesty International à l’indignation sélective et dont plus personne n’ignore la nature de ses bailleurs de fonds, vient de mettre les pieds dans le plat de l’intimité sociale de personnalités influentes à des titres divers.
Une application israélienne vendue au Maroc et à la Hongrie serait susceptible d’aspirer le contenu des smartphones de 50 000 personnes en France. Et au Monde et à France Inter de pousser des cris d’orfraie, de hurler à l’infamie contre un état despotique particulièrement expansionniste.
C’est oublier un peu vite qu’un état n’est pas responsable de l’usage qui est fait des ventes de ses sociétés privées, si tel était le cas, la France parmi les tout premiers pays producteurs d’armement devrait être poursuivie pour l’utilisation faite par des acheteurs indélicats.
S’agit-il de naïveté confondante, de pure mauvaise foi ou d’un dessein idéologique ?
Il est bien évidemment inadmissible, inacceptable, intolérable que les données personnelles de tout citoyen soient violées particulièrement pour des raisons politiques. Aucun débat n’est possible en la matière hors présomptions policières se référant à la sécurité publique et supportées par des ordonnances juridiques.
Là n’est pas le propos, les pratiques d’espionnage de citoyens ont de tout temps toujours existé et ont pris de l’ampleur durant la guerre froide avec l’avènement des moyens de télécommunications. Les réseaux sociaux ayant ouvert en grand les portes de l’espace privé individuel.
Comment pouvons-nous nous étonner de notre transparence ? Les séries policières et d’espionnage nous ont depuis des décennies démontré à quel point nos systèmes de communication étaient perméables, c’est même leur raison d’être… d’être ouverts.
Rien ne garantit la protection totale de l’espace intime, ni les liaisons téléphoniques, ni les courriers postaux et pas davantage les paiements par cartes bancaires. Nous savons cela, il suffit de lâcher un pet en surfant sur internet pour recevoir profusion de publicités pour des assainisseurs d’air. De même que prendre sa voiture pour divers déplacements suffit à recevoir mensuellement par Google le détail des destinations atteintes à quelques mètres près.
Point n’est besoin d’évoquer la multiplicité des caméras qui retrouvent un faciès parmi des millions et vous filment jusque dans vos activités les plus personnelles. Nous sommes en permanence sous surveillance et nous le savons. On peut évidemment le nier, mais pas l’ignorer. Nous savons également que des sociétés de gestion de données font commerce de nos intimités.
Des milliers d’yeux souvent dans des zones non soumises à la réglementation européenne observent, traquent nos mouvements, nos messages, nos choix, nos achats.
Il y a peu encore, les détectives de la vieille école fouillaient les poubelles, de nos jours un logiciel malicieux est suffisant pour découvrir notre nature profonde. La technologie se mettant au service de la surveillance individuelle, avec le paradoxe, que loin de réduire la criminalité cela en a au contraire augmenté l’occurrence. Dans la réalité, plus nous sommes surveillés et plus les actes délictueux augmentent. La démographie sans doute est-elle la cause de l’accroissement de la criminalité, celle-ci allant de pair avec les moyens de télécommunication. Même les plus démunis possèdent des smartphones et sont donc susceptibles d’être espionnés.
Dès lors, il est légitime de s’interroger sur l’indignation larmoyante et les sanglots de vierges effarouchées de la sphère médiatico-politique.
Il suffit de fréquenter des journalistes et d’en connaître la paranoïa professionnelle qui les anime, de les voir user de ruses de sioux afin de ne pas être écouté ou suivi pour perdre toute naïveté sur le secret.
Imagine-t-on Emmanuel Macron donner des instructions sur la politique française en Afrique sur son compte WhatsApp ? Les politiques et les diplomates savent pertinemment comment user de lignes et d’espaces sécurisés et ne partagent aucun secret par voie numérique afin de vivre normalement… comme tout citoyen lambda.
Le même citoyen qui ne comprend pas comment 100 000 messages haineux à l’encontre de Mila ne débouchent que sur 13 mises en examen, alors que les services fiscaux ont accès à tous nos comptes et adresses IP.
D’évidence, nous évoluons en liberté surveillée…de prés. Notre seul espace d’intimité est notre manque d’intérêt pour les observateurs avisés et surtout le nombre sidéral de messages et de vidéos à interpréter.
Les intelligences artificielles, aussi performantes soient-elles, sont loin de suffire. Et quand bien même toutes les informations croustillantes seraient décelées, encore faudrait-il des analyses humaines et des compétences juridiques pour les trier.
Il semblerait que Pegasus ait ciblé en France 50000 personnes afin d’en espionner les conversations. 50 000 personnes parfaitement conscientes que leurs propos peuvent être écoutés.
Souvenons-nous de l’affaire d’écoutes téléphoniques illégales de l’Élysée qui s’est déroulée de 1983 à 1986 sous le premier septennat de François Mitterrand.
Souvenons-nous des écoutes de la NSA concernant 35 leaders internationaux pour lesquelles Obama avait dû faire amende honorable.
Avant Pegasus, il existe le projet Échelon doté d’un budget annuel de 26,7 milliards de dollars qui permet aux services de renseignement américains d’espionner de manière routinière téléphone, fax et courrier électronique dans le monde entier.
Sans occulter la surveillance des réseaux sociaux qui filtrent les messages et les conversations.
Que dissimule cette enquête d’Amnesty International et toute cette agitation médiatique ?
Pourquoi soudainement ? De quoi souhaite-t-on détourner notre regard ?
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