ZONE INTERDITE
« En l’absence de réaction, il n’y aura plus aucun reportage ni enquête sur l’islam radical »
Menacée, Ophélie Meunier, présentatrice de « Zone interdite », vit depuis samedi sous protection policière. Me Richard Malka appelle les médias à la soutenir.
Par Nicolas Bastuck pour Le Point
« C’est la solitude qui expose ; c’est par la menace et la peur que la liberté d’expression est mise en danger, que la liberté tout court disparaît. La vérité est qu’on ne pourra bientôt plus parler de cette religion ni même de fanatisme et d’intégrisme. Encore un petit effort et ces sujets deviendront totalement tabous, un angle mort, un problème que plus aucun média n’osera traiter et aborder. » Contacté par Le Point, Me Richard Malka, avocat de Charlie Hebdo et de la jeune Mila, a vivement réagi aux menaces proférées contre l’animatrice de M6, Ophélie Meunier, et un jeune Roubaisien, Amine Elbahi, témoin de l’émission Zone interdite consacrée à l’islam radical, que la chaîne a diffusée le 26 janvier.
Tous deux menacés de mort sur les réseaux sociaux, ils ont été placés sous protection policière sur décision du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. « J’ai donné instruction qu’à chaque fois qu’un journaliste fait l’objet de menaces caractérisées, il bénéficie d’une protection policière », a réagi samedi sur Twitter le patron de la Place Beauvau.
« Ne pas la laisser seule »
Saluant « le courage » de M6 ainsi que des journalistes et producteurs de ce numéro de Zone interdite, Richard Malka, lui-même sous protection policière depuis 2015, a exhorté l’ensemble des chaînes de télévision à la diffuser. « La bonne réponse de la profession serait qu’en solidarité avec cette présentatrice (Ophélie Meunier), et afin de ne pas la laisser seule face aux menaces dont elle est la cible, toutes les chaînes diffusent ce reportage. Comme tous les journaux auraient dû, en 2007, reprendre et publier dans leurs colonnes les caricatures de Charlie Hebdo », encourage l’avocat.
« Sinon, le règne de la terreur s’étendra et on ne montrera plus cette réalité. Sans soutien, quel animateur, quelle chaîne acceptera, demain, de revenir sur ces sujets ? Quel témoin courageux osera parler à visage découvert, comme l’a fait M. Elbahi dans ce reportage ? Cet homme, qui défend courageusement une conception profondément humaniste de l’islam, devrait être unanimement soutenu ; or, il se retrouve aujourd’hui seul au monde », déplore Me Malka, dont le livre, Le Droit d’emmerder Dieu (Grasset), qui reprend sa plaidoirie en partie civile au procès des auteurs de l’attentat de Charlie Hebdo, s’est déjà écoulé à 80 000 exemplaires.
« Mélenchon, agent de la terreur »
« En l’absence de réaction, il n’y aura plus aucun reportage ni enquête sur l’islam et, en particulier, l’islam radical. On se dira que c’est trop de problèmes – on se le dit déjà, d’ailleurs… Et le “pas-de-vaguisme” l’emportera définitivement. Ne rien faire, c’est accepter de ne plus être informé, c’est laisser prospérer la radicalité », prévient celui qui défend également Mila, visée par des milliers de menaces de mort et contrainte, depuis deux ans, de vivre terrée, à la suite de ses propos sur la religion musulmane, sur les réseaux sociaux.
Richard Malka étrille enfin les commentaires de Jean-Luc Mélenchon, « qui n’a pas vu l’émission, mais s’est permis de la juger malhonnête », dans l’émission Face à Baba qui l’opposait sur C8 à Éric Zemmour, jeudi 27 janvier. « En agissant ainsi, avec de tels propos, M. Mélenchon se transforme en agent de la terreur », condamne l’avocat de Charlie.
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