Affaire Sarah Halimi: «Pour protester contre le jugement de Kobili Traoré, j’ai rendu ma robe de juge !» L’Observatoire Juif de France, tient à saluer et rendre hommage de Monsieur Jack Broda par son geste honorable.

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FIGAROVOX/ENTRETIEN – Jack Broda, juge du Pôle Social du Tribunal de Grande Instance de Nancy, a démissionné de ses fonctions pour protester contre la décision de justice rendant Kobili Traoré, le meurtrier de Sarah Halimi, pénalement irresponsable. Il espère une transformation de la loi et un nouveau jugement.

Par Aziliz Le Corre
Dimanche 25 avril, plusieurs manifestations ont eu lieu en France pour demander justice pour Sarah Halimi.

Jack Broda est pharmacien de formation, devenu juge au Tribunal de Commerce de Nancy, puis juge du Pôle Social du Tribunal de Grande Instance de Nancy jusqu’à sa démission pour protester contre le jugement de Kobili Traoré, le meurtrier de Sarah Halimi.
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FIGAROVOX. – Dans un article publié par nos confrères de L’Est Républicain , vous expliquez avoir rendu votre robe de juge, après le jugement de Kobili Traoré, le meurtrier de Sarah Halimi. Pouvez-vous nous expliquer votre acte ?


Jack BRODA. – Quand le jugement a été rendu et que la cour de cassation a confirmé que Kobili Traoré, le meurtrier de Sarah Halimi, était rendu inaccessible à toute sanction pénale, ma première réaction en tant que juge a été de me dire «Je rêve !». Pour protester, j’ai décidé de démissionner de mes fonctions. Ma démission a été acceptée et… regrettée.

Sur le fond de l’affaire, je dirai qu’il y a la loi et l’esprit de la loi. Il n’y a pas de réponse automatique sur un problème judiciaire par le biais d’une expertise, car l’expert exprime un avis, qui doit être corroboré par toutes les pièces du dossier.

Dans une autre vie, pharmacien, j’ai eu la chance de passer un diplôme d’éthique médicale, c’est une discipline précise dans la laquelle tous les éléments constitutifs des difficultés liées à la profession sont évoqués : médecins, patients, droits et devoirs de chacun. Il ne serait pas inutile d’instituer un nouveau diplôme universitaire d’éthique judiciaire comparable à celui de la médecine.

Quand on fait appel à un expert, le but n’est pas d’opiner du chef sur son rapport, il est nécessaire d’écouter, d’analyser tous les avis à charge et à décharge et ceci ne peut se faire que dans le cadre d’un procès et in fine le tribunal rendra son verdict en son âme et conscience.
Le manque de réflexion peut conduire à un manque de compréhension et d’analyse. Quand on fait appel à un expert, le but n’est pas d’opiner du chef sur son rapport, il est nécessaire d’écouter, d’analyser tous les avis à charge et à décharge et ceci ne peut se faire que dans le cadre d’un procès et in fine le tribunal rendra son verdict en son âme et conscience.

La justice ne doit pas être rendue par les experts.C’est pourquoi, je souhaite vivement un nouveau procès.

Il ne serait pas inutile d’instituer un nouveau diplôme universitaire d’éthique judiciaire comparable à celui de la médecine.

En tant que juif, évidemment cela m’a troublé : qu’est-ce que cette justice qui prend fait et cause pour ce qui semble être un assassinat antisémite ?

Je veux pourtant continuer à croire en l’institution que j’ai servie pendant plus de 25 ans.

À la suite des manifestations dans plusieurs grandes villes de France pour réclamer justice, le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, a annoncé que le gouvernement présentera fin mai en conseil des ministres un projet de loi pour combler le vide juridique apparu dans l’affaire Sarah Halimi. Est-ce une victoire ?

Enfin ! C’est une nécessité ! La loi ne doit pas être transformée de fond en comble.

Si la personne a tenu à se mettre dans cette position de délire : si elle boit, prend des drogues, elle recherche donc un état qui doit lui permettre d’outrepasser la loi.
L’article 122-1 du code pénal dispose :

« N’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ces actes. »

Il suffit d’ajouter :

« Sauf si ce trouble résulte de la consommation de produit stupéfiant, de drogue ou d’alcool. »

Si la personne a tenu à se mettre dans cette position de délire : si elle boit, prend des drogues, elle recherche donc un état qui doit lui permettre d’outrepasser la loi. Dans ce cas manifestement Kobili Traoré est pénalement responsable car selon l’axiome latin : Nemo auditur propriam turpitudinem allegans (« Nul n’est recevable à invoquer sa propre turpitude »).

Comprenez-vous qu’il faille attendre l’émoi du pays tout entier pour que le gouvernement réagisse ?

Les gouvernements se succèdent et malheureusement sur des sujets lourds et graves, ils n’osent pas toujours aller à l’encontre des corporations.

Il est encore temps de soutenir la proposition de loi de Nathalie Goulet, sénatrice de l’Orne, qui associée à des initiatives parlementaires de Roger Karoutchi et de Jean Sol, évoque le principe de l’irresponsabilité pénale qui doit se décider à l’audience et non en chambre d’instruction.
Si le gouvernement a mis du temps à réagir respectant la séparation des pouvoirs, Emmanuel Macron a bien compris les enjeux de ce jugement me semble-t-il.

Il est encore temps de soutenir la proposition de loi de Nathalie Goulet, sénatrice de l’Orne, qui associée à des initiatives parlementaires de Roger Karoutchi et de Jean Sol, évoque le principe de l’irresponsabilité pénale qui doit se décider à l’audience et non en chambre d’instruction.

 

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