Le Beau Geste de Macron

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La position récente de Macron sur l’antisémitisme peut être admirée, mais son bilan reste résolument mitigé.
Par Michel Gurfinkiel

Le président Emmanuel Macron a assisté jeudi soir au Stade de France, dans le nord de Paris, à un match de football entre le club israélien du Maccabi Tel-Aviv et le club français Paris-Saint-Germain, propriété du Qatar. Le match s’est soldé par un nul, 0-0. Selon l’Élysée, cette présence visait à envoyer “un message de fraternité et de solidarité après les actes d’antisémitisme intolérables” survenus une semaine plus tôt lors d’un match à Amsterdam entre le Maccabi et le club néerlandais Ajax.

On ne peut nier que M. Macron a pris une position forte à cette occasion, et ce, à plusieurs égards. Premièrement, par sa simple présence, il a dissuadé toute tentative d’annulation du match pour des raisons de sécurité publique, s’opposant ainsi efficacement au boycott d’Israël prôné par le mouvement BDS. Ce geste n’est pas passé inaperçu auprès de deux anciens présidents, Nicolas Sarkozy et François Hollande, ainsi que du Premier ministre Michel Barnier, qui ont eux aussi décidé d’assister au match.

Deuxièmement, en qualifiant de pogrom antisémite les violences de la semaine précédente aux Pays-Bas, le président rejette une narrative alternative avancée par la maire écologiste d’Amsterdam et son chef de police – reprise par des activistes d’extrême gauche et pro-palestiniens en France – selon laquelle ce seraient les “comportements provocateurs” de supporters israéliens “fascistes” du Maccabi qui auraient déclenché des “affrontements” avec la communauté musulmane locale.

Troisièmement, le président français envoie un message clair, neuf ans presque jour pour jour après le massacre islamiste du Bataclan, qu’il soutient Bruno Retailleau, le ministre de l’Intérieur nommé en septembre dernier par Barnier. Retailleau, dont la priorité est de restaurer l’ordre public face à la menace croissante des narcotrafiquants et des islamistes, avait récemment fait retirer une bannière pro-Hamas du Parc des Princes, le deuxième plus grand stade d’Île-de-France et domicile du PSG. Il a également signalé au parquet une déclaration controversée sur X (anciennement Twitter) de Marie Mesmeur, députée d’extrême gauche, qu’il accuse de cautionner ouvertement la violence anti-juive.

Quand le gouvernement français décide d’agir, il peut se montrer particulièrement efficace. La France reste un État centralisé, doté de multiples forces de sécurité : police nationale, gendarmerie, unités de maintien de l’ordre, et services de renseignement.

Ce soir-là, quelque 4 000 policiers et gendarmes en uniforme, ainsi que 1 500 policiers en civil, ont transformé les abords du stade en zone de haute sécurité. Dès 15 heures, l’accès à tout le quartier était restreint. Seulement 25 000 spectateurs ont été admis dans un stade pouvant accueillir 81 000 personnes. Chaque spectateur devait présenter une pièce d’identité et passer plusieurs contrôles de sécurité.

Des mesures de sécurité supplémentaires ont été prises pour prévenir tout incident ou violence dans d’autres parties de la région parisienne (malgré l’autorisation d’au moins une manifestation pro-palestinienne). La police française se souvenait que le 13 novembre 2015, des terroristes islamistes avaient tenté des attaques-suicides au Stade de France, alors que le président François Hollande assistait à un match, au même moment où ils attaquaient le Bataclan et ses environs.

Une posture ou une position ferme ?

Si l’on doit saluer la posture de M. Macron ce soir-là, on peut se demander si cela marque une prise de position définitive ou simplement un autre virage politique. Depuis le 7 octobre 2023, il a alterné de manière spectaculaire entre des positions pro-israéliennes et anti-israéliennes, comme si sa philosophie du “en même temps” – une réconciliation légèrement utopique des contraires – pouvait encore avoir du sens dans de telles circonstances.

En visite en Israël en 2023, M. Macron avait appelé à une coalition internationale contre le Hamas, calquée sur celle menée contre Daesh. Pourtant, trois semaines plus tard, le 12 novembre, il refusait de participer à une marche contre l’antisémitisme à Paris, invoquant apparemment les “sentiments” de la communauté musulmane française.

Le 7 février, il présida une cérémonie impressionnante aux Invalides en mémoire des 42 citoyens français ou franco-israéliens tués lors des attaques du 7 octobre en Israël, et en hommage aux trois ressortissants français encore retenus en otage à Gaza. Lors de cette cérémonie, le président décrivit les attaques du Hamas comme “le plus grand massacre antisémite de notre siècle”.

Cependant, il se montra par la suite critique des opérations militaires israéliennes à Gaza, allant jusqu’à interdire aux entreprises israéliennes de participer à des salons internationaux de l’armement à Paris en juin et octobre – décisions ensuite annulées par les tribunaux – ou à interdire certaines exportations d’armes vers Israël.

De même, lors d’un conseil des ministres le 15 octobre, il déclara : “M. Netanyahou ne devrait pas oublier que son pays a été créé par une décision de l’ONU et qu’il ne peut donc ignorer les décisions de l’ONU.” Une phrase qui semblait sous-entendre que l’existence même d’Israël en tant qu’État pourrait être remise en question.

Enfin, lors de sa visite au Liban le 24 octobre, M. Macron observait, à propos des opérations israéliennes contre le Hezbollah, qu’il “n’était pas sûr que semer la barbarie soit le meilleur moyen de défendre la civilisation”.

Le beau geste de M. Macron au Stade de France ce soir pourrait être une tentative de restaurer une certaine crédibilité après trop de zigzags. Il pourrait aussi refléter l’évolution des affaires internationales, dans le sillage de la réélection de Donald Trump aux États-Unis.

© Michel Gurfinkiel & The New York Sun, 2024

Traduit de l’Anglais par notre service.

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