Lettre ouverte d’Alain Jakubowicz au maire de Lyon
“Comme chaque année, Lyon commémorait hier, aux pieds de son Veilleur de Pierre de la Place Bellecour, la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de la Shoah. En votre absence (remarquée), les Lyonnais vous ont signifié, par contumace, colère et indignation. Et de quelle manière ! Claude Bloch, l’un des derniers survivants d’Auschwitz, arrêté par la Milice de Touvier en juin 1944, tournant le dos au discours votre adjointe et entrainant avec lui une foule agitée par l’émotion. Michel Noir, ancien maire de Lyon dont je fus l’adjoint au Respect des Droits, sortant de son invariable réserve pour vous dire, les yeux baignés de larmes et le doigt pointé vers votre représentante, que « vous déshonorez la ville de Lyon ».
Jean-Olivier Viout, Procureur Général honoraire, adjoint de Pierre Truche au procès Barbie, qui porte le projet de Mémorial de la Shoah à Lyon, abasourdi par la scène et se joignant à la manifestation spontanée. Mon confrère Richard Zelmati, président du CRIF régional, avec lequel nous avons plaidé parmi les parties civiles au procès de Barbie, appelant la foule à boycotter le discours de la mairie. Le fils d’une rescapée des camps interdisant à votre adjointe d’invoquer le nom de sa mère, avant de lui arracher le micro et de mettre fin à un discours que personne ne voulait entendre. Une Marseillaise improvisée pour guérir le trouble… En voyant ce désastre, le Veilleur a dû se retourner dans sa Pierre. La dernière fois qu’une cérémonie du Souvenir a donné lieu à un tel tumulte dans notre région remonte à ce jour de juillet 1998 où les associations de déportés ont interdit à Charles Millon d’accéder au Mémorial des enfants juifs exterminés d’Izieu après son accord avec le Front national.
Ce naufrage, vous en êtes le seul et l’unique responsable. Ce spectacle désolant d’une commémoration défigurée par la polémique n’a qu’une seule cause : vous et votre décision d’inviter dans les salons d’honneur de l’Hôtel de Ville de Lyon M. Salah Hamouri, militant activiste du Front populaire de la Libération de la Palestine, organisation figurant sur la liste officielle des groupes terroristes établie par l’Union européenne et qui entretient une rhétorique idéologique bien connue assimilant les Israéliens aux nazis. Cet homme, qui a été condamné pour avoir voulu assassiner le Grand Rabbin d’Israël et qui ne doit sa liberté qu’à un accord d’échanges de prisonniers islamistes du Hamas a été expulsé vers la France, au bénéfice de sa double nationalité franco-palestinienne. Lui et ses amis de la France Insoumise parlent de « déportation », ne pouvant ignorer dans un tel contexte l’usage nauséeux de ce mot plombé par l’Histoire. Cet homme, vous avez voulu le convier dans notre maison commune pour évoquer l’anniversaire des Accords d’Oslo, lui qui les a toujours récusés et combattus, sans que personne ne vienne lui porter la contradiction. Cet homme, vous avez voulu lui offrir les honneurs de notre ville, dans un salon qui porte le nom de Justin Godart, votre prédécesseur, fait Juste parmi les Nations, la plus haute distinction civile de l’État hébreu. Tout est symbole.
Vous venez d’annuler votre invitation, in extremis. Dont acte. J’espère, Monsieur le Maire, que vous mesurez l’ampleur de la crise que vous avez ouverte et qui ne cessera pas de sitôt. J’espère que vous mesurez l’opprobre jetée sur notre ville et due à votre seule inconséquence. Quand on a comme vous été le maire le plus mal élu de l’histoire lyonnaise, en raison de l’abstention massive due à l’épidémie, on ne se comporte pas en idéologue sectaire et on gouverne sa ville dans le souci de l’incarner, la rassembler et l’unifier. Il serait temps d’apprendre à connaître Notre ville et d’en respecter la mémoire et l’Histoire profanées par vos choix idéologiques”.
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