Amine Elbahi : “Voir Gérald Darmanin soutenir le maire de Roubaix laisse circonspect”
Trois questions à…
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L’implication du gouvernement contre l’islamisme et le clientélisme souffrirait-elle de faiblesses ? Au micro de BFMTV, Gérald Darmanin a exprimé sa sympathie au maire de Roubaix, Guillaume Delbar, pourtant mis en cause par la justice pour une subvention à une association prosélyste. Amine Elbahi, militant laïque à Roubaix, menacé de mort depuis son passage dans l’émission Zone Interdite, de M6 réagit auprès de « Marianne ».
C’est une marque d’amitié qui peut dérouter. Au micro de BFMTV, ce mardi 8 février, Gérald Darmanin a exprimé sa sympathie au maire de Roubaix Guillaume Delbar pourtant mis en cause pour des pratiques clientélistes.
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Au micro d’Apolline de Malherbe, le ministre de l’Intérieur (et ancien maire de Tourcoing) a déclaré soutenir son « ami qui traverse un moment difficile » et qui « indépendamment répond des difficultés qu’il peut avoir dans la gestion de sa commune (…) Le maire de Roubaix a trouvé une situation dans sa ville extrêmement difficile. Personne ne peut penser que le jeune maire de Roubaix est responsable de trente, quarante, parfois cinquante ans de renoncement de la république. »
La ville de Roubaix aurait financé jusqu’à l’été 2021 l’association AAIR accusée de prosélytisme religieux, sous couvert de cours de soutien scolaire, et qui a fermé ses portes depuis. Le maire divers droite de la ville, Guillaume Delbar, doit comparaître à l’automne devant la justice pour « détournement de fonds par négligence ». Interrogé dans un reportage de Zone Interdite diffusée le 23 janvier sur M6, l’édile déclarait ne pas avoir « vu le début d’une marque de prosélytisme » dans les activités de cette association. Avant d’admettre que les « cours coraniques, ça ne veut pas dire djihad ».
Présent dans ce même reportage de Zone Interdite, et menacé de mort depuis, le juriste roubaisien Amine Elbahi, assure avoir averti Delbar dès le mois d’octobre 2020. Pour Marianne, il réagit aux propos de Gérald Darmanin.
Marianne : Qu’avez-vous pensé des propos de Gérald Darmanin au micro de BFM ce mardi ?
Amine Elbahi : Dès que j’ai pris connaissance des propos de Gérald Darmanin, j’ai tweeté. Bien sûr qu’il a le droit d’avoir de l’amitié pour Guillaume Delbar. Mais dans ces propos, j’ai été surpris de ne pas entendre de mots pour Ophélie Meunier ou pour moi-même. Pourtant, j’ai pris des risques en mettant en lumière des faits inacceptables. Je cherche à promouvoir les valeurs de la République. Donc voir le ministre de l’Intérieur soutenir un maire qui est poursuivi pour « détournement de fonds publics par négligence », ça me laisse circonspect.
Je pense qu’il est surtout gêné parce que c’est son ami qui est en cause. Il défend une position intenable pour ne pas mettre en péril sa carrière politique. Tout ce que je retiens c’est que je n’ai pas eu le droit à un message de soutien. Mais finalement je le remercie pour ce non-soutien. Le Ministre montre que cette affaire est avant tout politique. Franchement, on en attend davantage d’un ministre de l’Intérieur.
Quel regard portez-vous sur la lutte contre le séparatisme menée par le gouvernement ?
Le reportage de l’émission Zone Interdite montre qu’il y a des dérives. Le gouvernement n’a pas été suffisamment loin. Personnellement, je suis favorable à la création d’un délit d’islamisme. Aujourd’hui la France est toujours dans la réaction, jamais dans l’action. Il y a un manque de volonté politique, regardez par exemple les magasins présentés dans le reportage de M6. Ils n’ont pas été fermés à cause du communautarisme mais pour des raisons d’hygiène. On parle de lutte contre le séparatisme mais il y a surtout de l’hypocrisie.
Que proposez-vous pour endiguer cette montée du communautarisme ?
Je pense qu’il faut réarmer le régalien, en renforçant les moyens de l’État. Il faut également renouer le lien avec les communes. L’action doit être modernisée. Mais pour cela il faut de l’ambition politique. Nos gouvernants en ont-ils ? Là est la question. En tout cas il est nécessaire de s’appuyer sur le terrain et pas seulement sur des chiffres comme le fait Monsieur Darmanin.
Je compte bien en faire partie et aider à la modernisation de l’action de l’État, dès cette élection présidentielle. Je me félicite que certains candidats d’ailleurs comme Fabien Roussel prennent en considération ces problématiques. Parce que là nous avons l’impression de tous vivre dos à dos. L’État devra apaiser et réconcilier.
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